Nous avons pu repérer un peu les lieux, quinze jours avant, en nous prenant un but à cause du mauvais temps. Cette fois, au moins, nous voyons l’arête dès la voiture alors que la fois d’avant, il a fallu se casser le nez dessus pour savoir qu’elle se trouvait au-dessus de nous, mais l’itinéraire n’est pas très évident pour autant.
Nous devons déjà laisser le sentier un peu avant le col, pour nous taper une montée au milieu des herbes trempées et dans un terrain un peu gadouilleux, puis prendre une écharpe de forêt en diagonale et nous arrivons au pied de l’arête, ensuite, il nous suffit de la longer, de remonter des pentes raides en slalomant au milieu de dalles, heureusement pas trop complexes à gravir, et en essayant de prendre là où l’itinéraire paraît le plus facile et nous voici au démarrage, sous une belle dalle qui rejoint le haut de l’arête et qui semble permettre une ascension facile.
Plus qu’à mettre les baudriers, s’encorder et enfiler les chaussons, pour ceux qui les ont pris, c’est à dire seulement mes deux seconds.
Moi, j’y ai renoncé au dernier moment, en pensant aux trois heures à passer les pieds compressés, et surtout à l’idée de marcher dans les parties faciles, avec ces engins de torture.
Et même si j’ai eu un petit regret au départ, car quand on démarre, on ne sait jamais trop ce qu’on va trouver au-dessus, et nous avions quand même peu de matériel, donc les protections étaient forcément espacées, finalement, ça passe très bien en grosses et c’est plus confortable. Le calcaire un peu cannelé est superbe, très sain et bien dentelé, ce qui permet de placer des sangles en les coinçant dans des anfractuosités, par contre, il y a très peu de lunules, je n’en ai trouvée qu’une.
Nous enchaînons une petite succession de murs, où je dois faire relais assez souvent, car nous sommes trois et notre corde n’est pas très longue. Pour gagner du temps et ne pas changer l’encordement en cours de route, nous nous sommes encordés comme sur glacier, plutôt qu’en flèche, en me laissant quand même une plus grande longueur entre moi et Pat, ma seconde, qu’entre Pat et Dom, le dernier.
Je monte donc normalement en tête, dans les passages plus délicats, en posant 2 sangles maxi, de toutes façons, on en a pas plus, il me faut garder la troisième pour le relais. Et je fais monter les deux autres qui se suivent, cordes tendus, et dès que Pat arrive au relais, j’assure le dernier à l’épaule, car évidemment, à partir de ce moment, il n’est plus corde tendue.
Du haut de l’arête, la vue est splendide, contrairement au jour de notre première tentative, le temps est au beau fixe. Cette fois, pas de soucis d’orage à venir.
Après quelques ressauts en 4 4+, nous arrivons dans une dalle lisse toute patinée, en 5+.
Ce qui me pose problème, c’est que le premier point est un peu haut pour ma petite taille et moi pour faire venir les autres, je n’ai pas eu besoin d’installer un relais, car je suis passée entre deux rochers, puis j’ai désescaladé une dalle inclinée, donc l’assurage à l’épaule pour faire venir les deux autres, était parfait.
Mais, je ne me sens pas trop de redémarrer dans la dalle au-dessus, sans avoir mis un point, car si je gicle, c’est la cordée entière qui se retrouve en bas.
On a perdu un peu de temps à coincer tant bien que mal une sangle, car là, ça ne s’y prêtait pas très bien, mais après quelques essais infructueux, j’ai réussi aussi à bien bloquer un de mes coinceurs pour le relier à la sangle et avec Dom en tension là-dessus, nous ne risquons plus rien.
Finalement, le premier spit s’atteint sans mal grâce à une bonne prise main gauche et un réta sur une petite vire pied gauche, mais je me sens plus à l’aise quand même, sachant que je ne fais prendre aucun risques aux deux autres.
Le 5+, je l’ai passé en A0, car je n’ai pas voulu tenter de faire de l’adhérence sur de la dalle toute patinée avec mes grosses, et en tirant aux premières dégaines, ça passe facile.
Puis nous avons atteint la fameuse croix où le parcours est moins soutenu, et où nous pouvons enfin avancer un peu corde tendu.
De temps en temps, quelques passages un peu plus complexes m’obligent à laisser les anneaux de corde et à avancer seule pendant que les autres attendent. J’ai dû faire encore un ou deux relais.
Quelques désescalades pas commodes nous ralentissent aussi de temps en temps, car parfois, pour plus de facilités, il aurait fallu quitter un peu l’arête et passer sur des petites vires en dessous, mais je m’en rends compte, une fois en bout de rocher, parfois un peu trop surplombant pour le redescendre et continuer droit devant.
Mais, nous trouvons toujours une petite faiblesse sur le bord de l’arête, qui nous permet de rejoindre des zones plus basses, sans avoir à faire demi-tour.
Le sommet nous paraît loin. Nous nous demandons même, à un moment, si nous ne l’avons pas passé, car de là haut, un sentier facile redescend par la face opposée à celle par laquelle nous sommes monté et il ne s’agit pas de le louper, car nous sommes un peu pressés par notre timing, enfin surtout moi, qui dois aller au refuge de l’Orgère faire la bamboula avec les Chamoisards, et qui ne louperais ça pour rien au monde.
Du coup, nous refaisons un tout petit bout dans l’autre sens, avant de se convaincre qu’il y a encore de la route à faire.
Il faut continuer encore un bon moment, avant que le sommet apparaisse et effectivement, on ne peut pas le manquer, une espèce d’horrible architecture le surmonte et la descente est balisée. J’ai vu après que l’arête fait quand même 1 km.
La vue est superbe, le Mont Blanc est juste en face et se découpe dans un ciel d’un bleu éclatant.
On n’a plus qu’à redescendre par un bon sentier qui nous mène au pied de la barre et rejoint notre point de départ.
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