lundi 29 octobre 2007

Goléon, version "automne" (3427m)

Têtes dans le guidon, dopés à l'émerveillement!

Encore un projet de longue date entre Nico "dalle en pente" et moi-même : le Goléon en automne. Vous avez certainement déjà observé sa parure printanière grâce à l'article de Strider (en avril). Nous serons donc au nombre de 4, avec Hélène (l'amie de Nico), et Quent, dont la particularité est d'avoir autant de fiôles que de poches sur le sac (heureusement que son sac est très compact ;-)

A la limite, de par les dangers très réduits que propose l'ascencion du Goléon, ce sommet constitue souvent un prétexte de découverte de l'altitude aux inter-saisons, spécialement l'automne.

Finalement, la principale difficulté du WE sera de passer une nuit à la belle étoile, près du lac, à près de 2500m. Heureusement que les températures se sont radoucies et que le vent fut pratiquement nul !!

Nous voici donc partis, gonflés à bloc, motivés par les perspectives spectaculaires d'une nature sublimée par le soleil annoncé et les couleurs chaudes et bienveillantes (mais pourquoi bienveillante ??) de l'automne.


Les cascades et autres goulottes commencent à se former


Nous sommes vraiment dans une période de transition : on a même vu une hermine, déjà blanche, et du coup mortellement exposée aux prédateurs dans ces pierriers encore secs !!

Arrivés au lac, après une montée assez rude avec des sacs ultra chargés, nous installons notre bivouac (le refuge est toujours en travaux). Le lac, gelé, nous offre un spectacle fantasmagorique, avec les Aiguilles d'Arves en fond :



Le coucher du soleil produit une lumière carrément poétique, dorée avec des reflets bleutés aux zones d'ombre goulottées. Hélène profite de ce tableau proprement hallucinant:

Les regards se croisent mais sont hypnotisés par cette lumière propre au recueillement:



Bon, mais se recueillir, ça ne nourrit pas son homme : il fait soif !! Et hop, à peine la pénombre prend le dessus que Quentin dégaine une fiôle de Whyski et que celle-ci se met à tourner dans tous les sens. Il fait frais, et se réchauffer devient un besoin vital. Mais nous sommes armés : soupe bien chaude, Chirouble, et,.......,et.......,et qui n'a pas rêvé d'une verveine citronnée devant la Meije éclairée par la lune ?? Hein, je vous le demande......ça c'est quand même un moment de montagne que l'on doit vivre au moins une fois dans sa vie : la verveine citronnée de Quentin devant la Meije au clair de lune !!

Ouf, la nuit ne fut pas si froide finalement ;-)

Au petit matin, la Meije (qui n'est finalement qu'une antécime du Râteau) peine à se refléter dans ce miroir glacé



Notez la prévoyance à toute épreuve de Nico en ces temps de troubles géopolitiques :


Et oui, on n'est jamais à l'abri nul part !!

Quentin entame avec détermination le long pierrier, sous le sommet du Goléon, qu'on voit ici sous un angle inhabituel:


Enfin on arrive au glacier : c'est le moment toujours frisquet de l'équipement


Euhhhh, vous ne le dites à personne mais Quentin et moi ne nous sommes pas encordés. Je connais très bien les lieux et je sais que la traversée du glacier jusqu'à l'extrémité de l'arête ne comporte aucune crevasses. Hélène et Nico progresse en direction de l'arête, que l'on va effectivement parcourir dans son intégralité, dans un but panoramique


Je me prépare à entrer dans l'arène glaciaire, à partir de laquelle l'ascencion du Goléon prend tout son intérêt, de par les couleurs contrastées entre le brun du poudingue alentour et la blancheur du bassin.




Nous arrivons sous le Bec de Grenier, où l'accès à l'arête nous oppose un petit mur raide



Comme quoi le Goléon sait être joueur, avec sa pléiade de couloirs (pas en condition), ses accès possibles dans du mixte pas trop raide et son arête obstruée de blocs qui nous obligent à sortir les mains de temps à autre.

Au menu, l'arête qui devient de plus en plus ardue jusqu'à un niveau de difficulté pil poil acceptable dans une optique "rando", sous le sommet.



Toujours les couleurs contrastées de l'automne en altitude:


L'Aiguille méridionale d'Arves:



L'arête devient gentiment aérienne:


Quentin part à la conquête du ciel :


Du sommet, vue sur l'arête:



Toujours un p'tit coucou aux Savoyards :



Vue sur les Grandes Rousses:



Et redescente sur le bassin glaciaire:


Par contre, étant donné qu'on est monté très tranquillement histoire de profiter des lieux, on a un tant soit peu bouffé l'horaire. Il va falloir vraiment pressé le pas, car il est 14h15 et nous sommes encore......au sommet. Pour ma part, je vais devoir annuler l'apéro prévu le soir avec François et Marie-Christine, car nous allons rentré tard dans nos chaumières !!

Cependant, la descente est très efficace et le pari horaire de 18h à la voiture sera tenu, au détriment des photos (je vous laisse imaginer la purté lumineuse qui fait ressortir chaque détails de la montagne, avec un ciel d'un bleu profond et le soleil qui s'acharne sur la glace du lac, sensationnel !!)

En bas nous sommes accueillis par deux tirs d'un chasseur, avec impacts à moins de 50m de nous (en témoigne le mélange de poussière et de fumée). Tout un symbole ce retour à la société débile des hommes (c'est bien tout ce que ça m'inspire).

Le soir, arrivée à Lyon, je retrouve ma doucétendre, mais quand je vois 21h à l'horloge, je comprends que nous avons tous oubliés le changement horaire. Mince, un manque à gagner d'une heure en montagne, ça suffit à justifier qu'on y retournera encore une fois avant l'hiver.

Un grand merci à Hélène, Nico et Quentin pour ce WE d'une convivialité mémorable, autour de cette fascination commune pour les belles choses de la nature. Et bravo Hélène pour son 1er 3000 !!


Par Sylvain Visse,

Ambin, neige, mélèzes et Extravache


"Hé ben dis-donc c'est vachement platré!" nous disons-nous, Joce et moi, en voyant la face Nord du Mont d'Ambin, dans le vallon homonyme que nous re-visiter. Pourtant toute la Vanoise est sèche. Mais il semble que des retours d'Est venant de la plaine du Pô aient affecté les sommets piémontais et strictement internes, c'est à dire frontaliers (Alpes Grées, Mont Cenis, Queyras). Et quelle neige italienne, nous allons nous en rendre compte.



Regardez la Parrachée, tandis que nous montons vers le Val d'Ambin, si isolé. Elle est toute sèche. Dans les hauteurs de Bramans, une forêt de mélèzes rouille majestueusement à l'automne.

Un Week End où les chamoisards sont très actifs:
-Nico Annapurna et Jo vont aller au Colombier
-Visse, Nico Dalle en Pente, sa compagne et Quentin partent pour le Goléon
et nous allons vers la face Nord de la Pointe d'Ambin, tater, espérons-le un peu de glace. Nous avions fait le Goléon il y a à peine 6 mois en ski et faire une nuit en refuge était plus souhaitable qu'un bivouac vu mon rhume.

Nous passons le refuge du Suffet, sous la paroi calcaire de la Pointe de Bellecombe qui t'introduit dans cet univers assez escarpé et reclus du Val d'Ambin. La route devient cabossée de partout et, petit à petit, un peu de neige apparait sur les côtés!

Arrivé au parking, voilà le décor planté! Ca sent presque l'hivernale.
On s'équipe tranquilement en vue de la montée au refuge d'Ambin, qui n'est pas très longue.

D'un côté le soleil des versants Sud du Mont Cenis, et de l'autre l'austère paysage enneigé du Val d'Ambin, qui tient plus du congélateur. Dans cette neige dispersée, il faut chercher un peu le chemin, mais par chance, il y a des traces. De toute façon, soyons francs, le vallon fait entre 30 et 50m de large en fond, c'est à dire qu'il est pas plus large que son talweg!! Alors bon le chemin n'est pas très compliqué.

La montée finale au refuge, sur son verrou nous surprend par la profondeur relative de la neige. Nous commençons à nous poser des questions sur la viabilité de la course demain...On verra bien, voilà ce qu'on a pu dire.

Le fond du vallon est dominé par la Pointe d'Ambin avec son glacier, et la masse effrontée du Grand Cordonnier d'Ambin, qui est plus petit, en fait. C'est un peu le gardien du secteur.










Nous avons déneigé à la pelle la porte d'entrée surlaquelle se trouvait une congère de 50cm de fond. Derrière nous, le vallon saupoudré, sorte de seuil d'isolement, chartreuse du bout du monde. S'il y a bien un coin "interne" au coeur, pour ne pas dire au creux, des Alpes, c'est bien le vallon d'Ambin.
Ce vallon cristallin est taillé dans des gros gneiss d'une composition proche des lauzes qu'on retrouve souvent dans la Haute Maurienne.


Le Grand Cordonnier et la Pointe d'Ambin, derrière.



Que le refuge est joli! Il y fait frai mais l'espace est on ne peut plus accueillant. C'est l'heure de l'apéro avec le côte du Rhone de Joce et les sauss' + tome bien affinée.


Le soleil se couche dans une athmosphère pourpre.


Le grand défi de la soirée, arriver à faire marcher ce satané poëlle qui tire mal. La galère! L'occasion de fous rires mémorables, car le briquet de Joce ne marchait plus et les allumettes étaient comptées!! A chaque plantage, la loose est plus proche. Mais c'était sans compter avec notre talent. Joce raconte tout ça dans le livre de bord. On y parle déjà de conditions butogènes, car on a flairé le coup.

Dehors la Lune éclaire le décor, mais comme le ciel est gonflé de cirrus et de gel en suspension dans l'air, ça donne une drôle d'ambiance :


6h30 réveil...Rien à cirer de l'heure d'hiver, nous ferons le passage la nuit prochaine. La Nature c'est pas comme les hommes, elle ne change pas de montre!
On a bien dormi, bon forcément il n'y avait personne dans ce refuge, pas de ronfleurs à l'horizon, le paradis. La neige met du temps à se transformer sous le réchaud et sa masse volumique est faible, du coup je prend le jus des pâtes chinoises dans ma camelback, mélangé à du thé, savoureux pour toute la montée!!!




Nous partons dans l'ambiance congélo, en direction du Lac d'Ambin, qu'on espère au moins pouvoir faire. Il y a des traces des gars qui sont passés hier mais quand bien même elles suivent bien ce qui devrait être le sentier, elles sont mal fichues, car éléphantesques.

Très vite, dans le fond du vallon, une profonde neige poudrée nous attend de pied ferme. Des grosses congères nous impose un brassage de rigueur, ne voyant pas les roches en équilibre en dessous, sans compter les passages de ruisseau soit gelé, soit trempé en une bouillasse douteuse.

Comble du pas-de-bol, Joce a des godasses trop light et moi encore pire, j'ai les godilles qu'il faut mais j'ai oublié les guêtres qui vont avec, c'est trop la loose. Mais bon on y va quand même, on sait jamais, si en haut tout est soufflé, il y en aura moins ??!!


Regardez le contraste : le Cordonnier d'Ambin bien blanc, et la Grande Casse, sèche comme un coup de trique, avec son névé sommital qui est en train de se déconnecter du glacier!!


Le Mont d'Ambin se reveille des nuées givrées évanescentes.


De quoi avoir le coup de cafard dans cette ambiance blafarde qui nous englouti. Nous passons au mieux la chaine un peu expo avec cette neige, puis la dernière pente à 30° avant le lac s'avère un brassage du tonnerre de Zeus où il fait batailler dans la poudre pour arriver à monter!


Arrivé au replat du lac, nous faisons un sombre constat, avant de voir le couloir pré-glaciaire qui en impose : ras-le-bol. Vaincus. Les congères masquent des trous partout, on n'a même pas fait la moitié, on a galéré pour une pauvre pente pas raide à 30°, alors les 150m à 45° prévu dans la face Nord, pas la peine, ça pourrait même nous partir sous les pieds, qui sait?










Bon voilà le Lac qui est en train de geler. Très profond, dans sa cuve de surcreusement glaciaire, et entouré de raidillons de partout, verrou compris. On est à Ambin, pas dans un alpage charmant des Aravis!




Joce à gauche et votre serviteur à droite, les tronches vachement emphasées par les circonstances :o)
Néanmoins l'athmosphère minéral et dépouillé du site nous séduit, mais un brin d'intimidation et d'austérité opressante. Ce pourquoi après une pause-barres, nous envisageons vite la descente.


Le Grand Cordonnier avec sa silhouette effrontée.


Le brassage ne s'améliore, à la descente c'est même pire. Des raquettes auraient pas été du luxe.






Le soleil arrive sur le Grand Cordonnier alors que nous retrouvons le fond du vallon avec ses mémorables congères de plus d'une mètre de profondeur, où le tuba et les palmes seraient plus utiles que les crampons.



Le soleil arrive, enfin. L'ambiance hivernale devient franchement skirando, manque une bonne couche ;-) Des jeux de lumières sympas s'imposent.



Le Grand Cordonnier nous fait un doigt d'honneur avec son gendarme "majeur". Quel enfoiré, celui-là! Il est bien content de nous avoir renvoyé au bercail.









On avait de la lumière et pourtant on a été cherché l'ombre de cette goulotte à l'accès assez sportif, mais proche du talweg. On avait prévu les deux piochons techniques (soit 1 piolet droit + 1 piolet technique chacun) pour la pente d'Ambin, bon ben, faute d'un matos suffisant pour la cascade (notamment une corde de rappel) on va quand même s'amuser un peu sur ses premières pentes peu exposées. L'occasion d'onglées quand même, mais la glace était d'assez bonne qualité ;-)

Après un petit topo sur le brochage pour Joce, nous descendons manger sur la terrasse du refuge sous un soleil un peu fuyant. Un couple de randonneur est là aussi, venu à la demi-journée.

Quelques coups de balais et raclages de vaisselle plus tard, c'est l'heure de la descente! Nous allons retrouver un monde plus civilisé.

Ha tient c'est désertique maintenant, ça ressemble à la Vanoise ;-)

Le retour par le vallon aux milles mélèzes fut grandiose :



Et puis tant qu'on faire, vu qu'on a un peu de temps, autant aller rendre visite à notre Dame d'Extravache. Ce lieu en dit long sur la définition du mot "harmonie".

L'église ruinifiée devant la masse ruinée de la Dent Parrachée, quelle cohérence de goût!


La vache extra, ou pastoralisme....avec patous qui aboient, siouplait. De bien belles lumières d'automne sur ce site à la splendeur paysagère unique.


Clocher et clochetons de la Parrach, où l'homme rejoint la Nature.


Deux sommets à résonance historique :
-A gauche le Mont Froid, sommet emblématique de la Seconde Guerre Mondiale et Forces Françaises Libres qui luttèrent contre l'occupant nazi et fasciste.
-A droite, le Mont Guisalet qui aurait vu à ses pieds à droite les éléphants d'Hannibal marchant vers Rome.


bon et puis tant qu'à faire, pour prouver au yautards et autres tarins que la Maurienne est belle, une petite photo de la Croix des Têtes au coucher de soleil ;-)

Merci Joce pour cette sortie atypique! et Merci le val d'Ambin pour ce but original. Révérence!

texte et photos Nico Strider,