jeudi 8 mai 2008

Une Brèche au coeur du sanctuaire des Aiguilles de l'Argentière

Doux lever de soleil aux allures d'un bon petit rosé de Provence sur la Dent de Cos, la toute première des Aiguilles de l'Argentière, situées bien loin de la fantaisie provençale, dans la froide dureté cristalline de la Chaîne de Belledonne.

Pierre et moi partons vers un coin pour lequel j'ai une grosse affection, cf les précédents articles du blog dans le secteur. L'idée du jour est de traverser une brèche au coeur du sanctuaire, la Brèche du Chien, qui culmine vers les 2700m, sous l'Aiguille d'Olle, sur une crête de gneiss amphibolitique assez escarpée par endroit, entre le glacier de l'Argentière (le second glacier belledonnien en taille) et le névé de la combe de l'Aiguille d'Olle.


La pente d'accès à la combe de la Croix est encore plus ou moins enneigée, mal regelée, et cabossée par les vieilles purges printanières déjà bien décaillées. De quoi présager de la soupe à deux balles pour la descente. Commencent les petits tracas techniques de débuts de rando : tandis que je découvre une belle opportunité de cloque derrière le talon (ha les godasses de ski...sans commentaires...malgré tous nos efforts pour les améliorer) Pierre ne trouve pas ses lunettes de soleil. Le truc facheux qui peut arriver à tout le monde, mais en mai force est de reconnaître que l'insolation sur la neige est vraiment impitoyable.

Voici la dernière large pente avant d'entrer dans le "sanctuaire" :


Derrière nous, le col du Glandon, en cours de déneigement, puis la Croix de Fer et derrière, le tryptique des Aiguilles d'Arves:


Et voilà la combe adorée, au niveau du plan des Trois Eaux, dans un joli jeux de lumière :


Tandis que Pierre et moi se prêtons une paire de lunettes de temps en temps pour limiter le problème, ces ombres ondulantes sont les bienvenues.
Avec le recul, c'est un spectacle de voir diviser une combe divisée en deux en son talweg par la lumière, sorte de révélation géométrique :


Arrivé au fond du plan des Trois Eaux, nous voilà au pied de l'Aiguille Reynier, l'une des plus emblématiques Aiguilles du groupe :


Pierre semble perdu dans les champs de neige alors que la lumière est encore douce, mais suffisante pour faire décailler une neige qui a pourtant bien regelée à cette endroit :


Reste encore le verrou final avant d'entrer dans la combe supérieure où se trouve le glacier et la brèche de l'Argentière. Il est déjà bien réchauffé :


Nous voilà à 2400m sur la combe supérieure. A notre gauche, l'Aiguille d'Olle et son cirque. La brèche du Chien est dans ce cirque à droite, et vers le bas on voit les pentes de retour à la combe, plus soutenues :


Puis se révèle à gauche, les plus hautes Aiguilles de l'Argentière, notamment l'Aiguille Michel, au pied desquelles s'étend le glacier homonyme et au fond au centre la brèche homonyme, lieu que Visse reconnaîtra lors de sa traversée l'année dernière :


Pierre ayant trop de souci avec la question de lunette (qu'il va essayer de retrouver dans son sac) et n'étant pas en très bonne forme (vu son coucher tard) décide d'en rester là, à attendre le temps que je traverse la brèche.

Du coup je presse un peu le pas et je traverse la combe jusqu'au pied de la langue glaciaire (masquée sous la neige) que je remonte. Ambiance glaciaire sympa, alors qu'à ma gauche (photo) apparaît en contre-jour la fameuse brèche du Chien et à ma droite (photo) apparaît le col du Long de Rosnay, visité en avril 2007 avec Fred (cf article blog) :


L'ambiance, plein nord, y est haute montagne, pourtant à une altitude modeste. Une ambiance cristalline est saisissante, comme c'est le cas de cette aiguille contrefort de l'Aiguille Michel :


Après quelques petits dévers et arrivé à une zone de boulettes d'avalanches, je profite de ce terrain peu lisse pour déchausser mes skis, et mettre les crampons car la brèche impose un couloir de 30-50m à 35-40°, suivant enneigement, qui, généralement en neige dure (expo N), nécessite piolet et crampons. J'en profite pour prendre en photo la combe vu du glacier, avec la brèche et la crête de la Marmottane, et plus à l'Est, la cime de la Sambuis :


Sur une petite crête de neige avant le couloir, on peut admirer le Rocher d'Arguille (visité en mars 2007), et le Bec homonyme, tous deux à plus de 2800m:


Petit autoportrait devant la brèche de l'Argentière et Rocher Badon :



Et voilà la brèche et la fin de son couloir d'accès :


En montant, belle vue sur le glacier et les Aiguilles Michel et de Marcieu:


Et me voilà en haut de la brèche, retrouvant la lumière! Belle vue sur le couloir d'accès en contrebas:


Je rencontre un gars à l'accent bien savoyard qui est monté seul par le col de la Combe, juste en face de la Brèche.
Dans la lumière, nous voyons les puissants contreforts de l'Aiguille d'Olle, avec son névé-glacier au pied :


La Brèche du Chien, bien taillée dans les gneiss très compacts des Aiguilles d'Argentière permet de passer dans le cirque de l'Aiguille d'Olle, où se trouve, en face(photo de droite), le Col de la Combe et l'Aiguille homonyme, dominant la flèche de l'Aiguille Reynier.


Le tout a un aspect de flèches de cathédrales gothiques, bien architecturées, aérées de belles pentes de neige lumineuses et spatieuses : d'où cette notion de "sanctuaire".

Je chausse les skis pour descendre dans une transfo bien lourde pour vite retrouver une neige plus dure au creux du cirque, d'où la vue est sympa:


100m plus loin, me voici, sans remonter au Col de la Combe, très lumineux et un peu plus escarpé de l'autre côté :


Et voilà en recul la traversée entre la Brèche du Chien au fond et le Col de la Combe :


Je mange deux ou trois barres puis je file en descente dans le cirque pour rejoindre en bas la combe supérieure de la Croix. La descente se fait par des pentes bien rondes, en neige dure :


Vers le bas, alors que je vois Pierre dans la combe sur une moraine, ça se complique un peu. La pente est un peu plus raide (35°-40° au plus, mais court) mais c'est pas tellement le problème, avant tout celui de la dureté assez importante de cette neige exposée nord. Obligation de serrer les virages pour maîtriser les prises de vitesse!!


Entre temps Pierre avait retrouvé ses lunettes au fond de son sac, c'est souvent comme ça qu'on les retrouve. Nous perdons pas de temps pour descendre et avoir la meilleure neige, pas trop transfo. Mais en mai, tout transforme bien vite pour peu que ce soit bien exposé!!


On trouve vite une neige lourde dans le verrou au-dessus du plan des Troix Eaux, d'autant que le coin est encombrée de veilles coulées de purges :


On retrouve ensuite les grands espaces de la Combe de la Croix, baignée d'UV où ça flaire bon les palmes et le tuba!!


Le retour sera tranquille avec un bien agréable pic-nic dans la vallée...Merci à Pierre d'être venu pour cette belle rando!

Texte et photos Nico Strider,

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