mercredi 21 avril 2010

Un roman, le Swan ?

Textes : Hydra
Photos : Bernard, Pastriste & Hydra
Participants rôle principal : Bernard, Pastriste & Hydra
Participants second rôle : FMJ & Ice
Secteur : Gavarnie, hautes Pyrénées

Coucher de soleil sur le Cirque



Le swan ? un livre ouvert vu de Gavarnie !

Cette fois c’est sûr , avec deux sorties enregistrées en moins de 3 jours sur C2C, le Swan est en bonnes conditions. Nous prenons donc avec Pastriste, la décision d’y aller ce WE de la mi-avril.

Je ne sais pas si c’est par ce qu’il porte le nom d’un personnage de Proust (à un N près, quand même), ou qu’il ressemble de surcroît à la reliure d’un livre ouvert, mais c’est le seul itinéraire que je connaisse dont la notoriété l’emporte sur le nom du sommet affilié. Qui en effet s’intéresse au Grand Astazou ?

Personne. Pas même un Sioux. Par contre, le Swan, tout pyrénéiste veut y aller. C’est un passage obligé.

D’ailleurs, notre future cordée de 3, qui comprend Bernard, un compagnon albigeois de Pastriste, totalise a elle seule 4 buts au Swan ! De quoi imposer le respect, même si, bon c’est vrai, dans cette histoire, Pastriste en compte 2 à lui tout seul ! Mais notre premier échec en commun avec Gilles et Rapha m’avait laissé un goût amer d’incomplétude et une drôle odeur dans la 206 de Karine…

C’est que le père Swan est particulièrement pinailleur au niveau des conditions : s’il y a trop de neige, c’est avalancheux, s’il n’y en pas, c’est en glace et c’est plus dur de passer la première longueur délicate à 70°.

Je retrouve Pastriste et Bernard à Lourdes, d’où nous co-voiturons en direction de Gavarnie. Redoutant la sur-fréquentation des refuges et cabanes locales, aux places très limitées, nous prenons la pari de bivouaquer et d’enchaîner toute la course dans la journée, en partant tôt le matin.

Après quelques lacets, le cirque apparaît sous nos yeux sous la lumière irréelle de douceur du soleil couchant. A gauche du cirque, le Swan, brille de mille feux. Tout s’annonce bien.





Pour l’heure, après les incontournables photos, notre priorité est de trouver un chouette spot de bivouac. Après quelques pérégrinations, nous trouvons notre bonheur, à deux pas d’une source d’eau et d’un local à poubelle. Que demande le peuple ? des sous ? oui, on sait…..

C’est à ce moment précis qu’arriva le drame. En pleine préparation, je renversai ma gamelle de nouille chinoise. Non pas que ce met fut aussi bon qu’un curry froid fait par Strider, mais que faire le Swan le ventre vide ne m’enchantait guère…heureusement que Pastriste put me dépanner avec quelques pâtes.




Je ne sais pas si c’est à cause des pâtes de Pastriste ou de mon Bordeaux, qui était un poil bouchonné, mais j’ai particulièrement mal dormi, surtout au moment, vers 2 heures du mat, où Pastriste s’est mis à discuter avec Bernard….Du coup, à 3H45, au réveil, ce n’est pas la grande forme. J’aurai préféré 4H mais comme Pastriste voulait se lever à 3H30, Bernard a décidé de couper la poire en deux. Paix à son âme.

Nous prenons enfin la direction du Swan à 5H01 et 43 secondes. Il fait un poil frais, mais sans plus. Nous remontons rapidement un bon sentier qui nous amène à la cabane de Pailla. De là, nous sommes plongés dans le grand bain, au pied du Swan. De ci de là, brillent plusieurs frontales. De quoi confirmer les hypothèse pastristienne sur la fréquentation.





Nos premiers pas sur la neige nous donnent le sourire : c’est bien gelé, on va pouvoir tracer !
Je suis quelques temps une vague trace puis nous faisons la première pause pour nous équiper.
Bernard part devant, le temps que j’attende Pastriste….je comprends mieux pourquoi le bougre voulait se lever à 3H30 !

Nous repartons de plus belle, suivis par 3 Espagnols. Nous rattrapons Bernard, bien plus tard, dans le cône de déjection du couloir, bien raide et tapissé de coulées récentes. En me retournant, je constate que nous sommes talonnés par un V2. Au pied de la première longueur, en attendant notre tour, nous tapons un brin de causette avec le V2 en question. Ce skieur véloce qui porte un casque à visière (signe indiscutable d’une pratique de la cascade de glace) ne serait-il pas FMJ ? Bingo, c’est bien lui ! Comme quoi le monde est petit, surtout à Gavarnie…


Nous laissons partir FMJ dans le goulet de la première longueur, car il doit rattraper Ice, plus haut dans le couloir ( une histoire de crampons perdus en chemin), puis nous sommes moins inspirés de laisser passer à leur tout deux soloistes Espagnols. En effet, ces derniers n’hésitent pas à talonner notre FMJ national, qui du coup, décontenancé, perd de son allant, Puis dépité, il constate que les deux gugusses le doublent simultanément par la gauche et la droite, dans une manœuvre à la limite d’une nouvelle déclaration de guerre franco-ibérique.

Je m’élance à mon tour. Fort de mes expériences hivernale de glace, je prends vite mes marques dans la glace de ce premier ressaut, même si j’ai du prêter un de mes quarks à Pastriste, qui ne possède pas de piolets traction, mais les spindrifts envoyés par FMJ et ses potes Espagnols transforment vite mon ascension en douche écossaise, sauce Ben Nevis…il manquerait plus que Rozenn….

Je plante une première broche pour le plaisir (merdouille je perds le capuchon dans la manœuvre) puis je constate avec stupéfactions que mes gants de cascade de glace en néoprène, qui ont fait des merveilles cet hiver (et même des spaghettis), sont en train de geler ! Je n’arrive quasiment plus à bouger les doigts.




Plus haut, à la hauteur du seul point de la voie, il me faut plusieurs minutes pour installer une pauvre dégaine sur une sangle gelée tant chaque manœuvre est délicate et proche de la torture.
Ouf, ça y est ! ce point posé va pouvoir sécuriser notre cordée. Du coup, je n’ai pas d’autres choix que de poursuivre ma route. Ma seule consolation, c’est d’être sorti de la première longueur délicate.

Ensuite, la pente est moins forte mais demeure inexorablement très soutenue. Le manteau hétérogène me force à la prudence et à tailler des marches avec application pour mes deux seconds. Je ne sais pas si c’est le fait de progresser plus rapidement, et donc de me réchauffer quelque peu, mais je retrouve de la mobilité au niveau des extrémités. Quand tout à coup, une terrible douleur me cloue sur place : comme si le bout de mes 10 doigts brûlaient simultanément. Je me tords de douleur, chose peu indiquée dans un couloir. Mais du fait du vent, personne ne peut entendre mon cri.

Je suis au bord de tout vouloir arrêter et d’appeler le PGHM…mais comment pourrais-je le faire ? Nous progressons à corde tendue et je ne pourrais jamais attraper mon GSM, pourtant tout proche. Je n’ai pas le choix, je dois continuer. Petit à petit, la douleur s’atténue et mes doigts bougent à nouveau : c’est tout bêtement une belle onglée.

Je prends peu de plaisir dans le reste de la voie, du fait de la douleur d’une part, mais aussi de la monotonie du parcours. D’autres parts, je n’oublie pas le précaire de notre situation : la moindre chute d’un membre de notre cordée ou d’un alpiniste engagé au dessus de nous, aurait des conséquences en séries pour le moins funestes. C’est pourquoi j’essaie juste d’assurer un rythme constant pour en sortir le plus vite possible…mais Dieu que ce couloir est long une fois engagé dedans.

Puis enfin la pente s’atténue imperceptiblement, des rayons de soleil me parviennent plus franchement : enfin la sortie. Je suis complètement vidé.





Au col Swan, en plus du Mont Perdu et du Cylindre, FMJ et Ice nous attendent amicalement. Cela me réchauffe le cœur de les voir ici, en mangeant un morceau, sous un des sommets qu’Aurore espérait gravir un jour. Ce mini-G2G impromptu doit hélas prendre fin, avec le départ des nos amis skieurs vers le refuge de Tuquerouye.

Avec Bernard et Pastriste, nous prenons le chemin du Grand Astaozou, via une arête de neige un peu mixte. En plein milieu, un peu au dessus des 3000 mètres, après un premier arrêt, j’en ai plein les bottes, je n’ai plus la force de continuer sur cette arête aérienne, cornichée, nécessitant beaucoup de concentration et je décide donc de rebrousser chemin.
Quant à eux, Bernard et Pastriste prendront depuis sommet de très jolies photos.




Une fois bien réchauffé et mes compagnons de retour, nous filons vers Tuquerouye. C’est un vrai solarium. La trace commence à donner des signes de faiblesse. Sur la dernière traversée, Pastriste, est à son tour mis au supplice à cause d’une douleur à un genou. Les derniers mètres pour gagner le refuge, où nous l’attendons, seront pour lui un véritable calvaire.

C’est un poil le bordel dans le refuge où des Espagnols essaient de faire du feu, alors qu’il fait déjà bien chaud dehors, et enfument tout le monde. Je n’arrive pas à me reposer alors qu’il le faudrait vu la suite des hostilités.



Quelque peu requinquée, notre cordée repart en direction de la Hourquette d’Alans. Nous traversons la frontière en quittant le refuge, et basculons côté cirque d’Estaubé, en descendant le couloir de Tuquerouye gavé de neige fraîche. Nous croisons encore des Espagnols qui souhaitent, de façon un peu utopique, vu les conditions, se rendre au Mont Perdu le lendemain.

Comme Bernard seconde Pastriste qui traîne la patte, je prends un peu d’avance et manque de peu de me faire emporter par une petite coulée qui passe deux mètres devant moi. Ouf ! J’attends mes compagnons pour les prévenir du danger. A leur arrivée, nous faisons une pause. Pastriste en profite pour tester une nouvelle façon d’appliquer de la crème solaire, puis nous repartons.

Il faut désormais remonter la Hourquette d’Alans, afin de basculer dans le cirque de Gavarnie.
La chaleur nous accable. Chaque mètre est une petite victoire. A un moment, je tombe dans un piège à loup où je m’enfonce jusqu’à la taille, sans toutefois toucher le fond. Un Espagnol, bon samaritain m’aide heureusement à sortir de ce traquenard. Je suis tout essoufflé. Nous essayons avec Pastriste, de suivre, avec peine Bernard, qui atteint la Hourquette avant nous. Chapeau pour un soi-disant retraité !

C’est enfin notre tour d’y arriver. Moments de joie ! Mais de courte durée, car il reste encore pas loin de deux heures de descente…la bière n’est pas encore pour tout de suite. Cette perspective me galvanise et me donne des ailes dans la descente, où je retrouve comme par magie, toutes mes facultés.
Une dernière frayeur en chutant sur des dalles rocheuses entre deux langues de neige. Puis c’est la cabane de Pailla et la pause deséquipement. Une heure plus tard, nous serons à Gavarnie, autour d’un bonne Hoegaarden….triplement méritée après ces 12 heures d’efforts à travers ces 1800 mètres de D+.

Un roman, le Swan ? non, plutôt une vraie bonne bavante !

A bientôt pour de nouvelles aventures....


Toutes les photos de Bernard & Pastriste sur ce lien :

http://picasaweb.google.fr/pastriste81/LeCouloirSwan17Avril2010?feat=email#slideshow/5461540443456507922

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Eh bien tu l'as eu, ce Swan ! je me rappelle quand on l'avait observé de retour du Taillon, j'avoue que c'est un beau couloir, d'apparence rectiligne mais finalement pas tant que ça quand on voit vos photos. Bravo à tous. Pour ma part je me reconcentre sur de la course à pied: 10km le 1er mai à Cergy (95) et semi-marathon à Oloron début juin (boîte de chocolats Lindt aux arrivants, hé hé hé) puis cet été, au programme: une ascension non-stop du Mont-Blanc depuis la vallée avec mes frangins, en mode ultra-léger (si j'ai la caisse... et qq kilos en moins)= 4000m+ à caser entre 22h et 7h du matin. C'est d'ailleurs plutôt la descente qui m'inquiète (fatigue...)
à+
jc