jeudi 30 octobre 2008

Première sortie hivernale au Nivolet


Ce matin, le spectacle est à la hauteur des espérances : les Préalpes sont platrées à souhait et ce presque jusqu'en bas, ce qui est rare pour la saison. Du coup je sens monter une terrible poussée de nivéostérone (hormone que l'on succrète à cette période de l'année en attente de la neige) et après un rendez-vous à 10h, je décolle illico avec mes affaires et mon VTT, vers la Croix du Nivolet. Faut aller voir ça, ne pas rater le spectacle.

La montée à Lovettaz en VTT n'est pas trop longue (500m) mais elle est assez raide! C'est le contre-la-montre en vérité, car la neige fond en bas et le but est d'en avoir le plus possible en montant le plus haut!

Cette neige commence modestement à Lovettaz, à 750m à l'entrée du magnifique cirque de la Doria, surmonté par la Croix du Nivolet, à deux pas de Chambéry . Les toîts et les jardins sont encore un peu blanchis :


Il y a ce large sentier forestier très fréquenté en été mais déserté ou presque à cette saison. Entre 800m et 900m regardez la différence d'enneigement :


La dynamique de fonte s'opérait surtout en dessous de 900m en vérité. Au-dessus, autour de 1000m, nous sommes en plein hiver et c'est un bonheur indicible que de revivre ces purs moments d'émotion blanche, ce silence profond de l'hiver, cette poésie épurée :


Les patous ont déserté les alpages du Nivolet, laissant place à des champs de neige (surement éphémères, mais bon...) avec au moins 20-30cm de neige de plus en plus froide :


Au loin le front nuageux venant du sud progresse très rapidement, épargnant pour l'instant Belledonne et les Alpes internes, mais vient vite me cueillir au pied de la Croix du Nivolet, dans une tempête de neige ventée oblique :



Cela devient un véritable frigo au point que je me demande si je vais pas renoncer. Je me suis jamais pris un but au Nivolet, ce serait l'occasion! Mais connaissant la rando comme ma poche (je dirai même mieux que ma poche), je me dis que je peux aller au moins qu'au pied du Pas de l' Echelle pour accepter la défaite. Plus escarpé, j'aurai au moins une bonne raison.

Mais voilà que sur la vire un peu aérienne et les dalles, j'arrive à déneiger le cable qui, pour la première fois, me sert à quelque chose!! Il ne reste plus que la cheminée coincée entre un magnifique gendarme décollé de la paroi :


L'Echelle (qui est en fait des barres métalliques et des prises en poignées) est gavée de neige et légèrement verglacée mais facile à déblayer des mains et des pieds. Si bien que j'arrive sans encombre au Pas, presque dans la brume :


Sésame pour la Croix du Nivolet qui est à 15min, et dont les 25m de l'édifice ne passent pas inaperçus malgré les médiocres conditions athmosphériques :


1545m : un vrai frigo très venté, on tient à peine débout ! Mais je crois que c'est la première fois que je vois personne au sommet!!


Bien que je sois dans la tempête de neige, j'arrive quand même à voir Chambéry , un peu écrasé sous la cloche nuageuse :









Dans certaines congères je trouve jusque 60-70cm de neige!
Le retour va se faire par le Col de la Doria, l'occasion d'aller marcher tranquillement sur le plateau de la Feclaz, appelé aussi le "Petit Canada" et force est de reconnaître qu'en ce jour, il porte bien son nom:


L'ambiance hivernale, toute blanche, est un bonheur retrouvé, une sorte de paradis qu'on avait perdu pendant l'été, il y a cette "tranquilité absolue" et cette profusion du décor à perte de vue, le sentiment d'être engouffré par les arbres et de s'y sentir comme protégé. La neige est tellement poudrée qu'on a envie de se rouler dedans ! Je me sens comme un gosse dans cette poésie blanche, cette féérie naturelle, toute offerte à moi, juste par l'effort de mon pas.

Au Col de la Doria j'entrevois un Margeriaz bien gris, engoncé dans la tempête. Je descend côté Chambéry, pour passer aux pieds des cascades de la Doria (très nombreuses tout le long du Thalweg) dont je ne verrais qu'un exemple probant, juste situé entre l'automne où je suis, et l'hiver, quelque mètres plus haut!!


Il est amusant de voir parfois comme ces petites sortie tout seul pas loin de la maison peuvent réserver des trésors !

texte et photos Nico Strider

mardi 28 octobre 2008

La Traversée des Arêtes du Gerbier

Rien de tel qu'une petite brume coincée dans une dépression karstique pour nous mettre dans l'ambiance d'une belle matinée d'automne dans le Vercors!

Texte Nico Strider ; Photos : cadre vert Nico Annapurna, rouge Sylvain Visse, blanc Nico Strider

Ce matin là, l'air est à peine frai, c'est encore les dernières bribes d'un été indien, ou d'un automne radieux, c'est selon...Choupi', Nico, Sylvain et moi, partons du hameau des Clots avec pour projet la traversée des très classiques mais non moins élégantes arêtes du Gerbier, dans le massif du Vercors, au-dessus de Villard-de-Lans.

Un week end Chamoisard-Vercoresque, puisque nous ignorons que François est non loin partant en falaise de Presles, dominer les gorges de la Bourne. Les petits jeunots que nous sommes avons préférés l'altitude!

Après une traversée bucolique en forêt avec un poljé des plus étonnants, nous abordons la combe Charbonnière aux pieds de la masse compacte de calcaire urgonien qui forme les crêtes du Gerbier, et le rebord oriental du massif du Vercors :


L'objectif est d'accèder à une brèche double, sésame de l'arête. Mais avant cela il y a un obstacle de rigueur : la masse calcaire est entaillée d'une unique grande fissure où se trouve une longue cheminée humide et avec des nombreux cailloutis au fond :


Casque de rigueur, nous ne sommes pas les seuls, il y a drolement du monde et le passage est plus ou moins scabreux! Nico, est encordé avec Sylvain et moi avec Choupi'. La cheminée compte deux pas assez délicats, dont le premier n'est pas protégeable et les prises étaient de plus en plus imbibées de la boue au fur et à mesure des passages, en cause le sol humide et terreux incrustant les semelles des alpinistes précédents. Nico, dans le passage, utilise astucieusement la corde avec la cordée précédente tandis que moi, sans protection dans le premier pas j'esquive un zippage de rigueur sur la boue d'une prise, en me disant que finalement les bras tiennent quand on leur demande de tenir!! Voilà qui me rappelle quelques frayeurs spéléologiques...

Après la cheminée, on accède rapidement à la lumière au coeur des édifices naturels, dans une belle ambiance calcaire :

Les deux passages à réequiper et une autre cordée passant devant, décalent notre progression et Choupi' et moi rejoignons Nico et Sylain sur la brèche, contemplant un paysage déjà grandiose:


Le cadre proche est élancé et préfigure déjà un peu du caractère aérien de la course, avec l'arête qui se profile derrière un petit ressaut herbeux :



Choupi' et moi abordons le premier ressaut dans des gradins très agréables sur un rocher très joli:


Nous sommes rapidement suivi par Nico et Sylvain, ainsi qu'un couple très sympathique, qui prendra plus son temps. Le ressaut passé, nous voilà sur le fil de crête, encore assez large au début :


Dire que nous marchons sur un ancien fond marin, corallien, sédimenté il y a 120 millions d'année.

L'ambiance devient plus aérienne, les perspectives se construisent, la roche devient plus compacte et le parcours plus ludique :


Voilà que l'on approche des premères zones étroites, à contre jour : le caractère effilé contraste avec les grandes étendues forestières des plateaux du Vercors.


Ah, le premier passage très effilé de la course, esthétique et pourvu d'excellentes prises :


La lumière rasante d'automne suggère juste la ligne de faîte, dessinant le cheminement comme un sentier d'or :


Arrivé dans la partie centrale, nous décidons de ne pas shunter une partie élancée et aérienne, pour ainsi dire au coeur de l'édifice, franchissant divers tourelles :


Le cheminement, dans la fraîcheur de l'ombre est restreint par l'étroitesse des passages, demandant une lecture en continue et un brin d'astuce, comme un jeu de piste grandeur "Nature". Choupi', au bout de ma corde laissée à 10-15m, concentrée au maximum, se faufille avec souplesse et douceur dans le dédale de tourelles calcaires...Tandis que Nico et Sylvain nous suivent de près, dans un rythme harmonieux qui semble nous convenir à tous.


Lumière rasante sur cette partie plutôt impressionnante, malheureusement shuntable, nous ne regrettons pas le (modeste) temps qu'il nous a demandé à la vue de son esthétique exaltante :


Nous voilà dans les parties sommitales, dominant le bassin grenoblois à la ville tentaculaire :


La fin de la crête réserve aussi son lot de passages effilés. Il y a une descente dans une petite brèche, puis la remontée très esthétique d'un ressaut jaune fissuré, plus simple qu'il n'y parait de premier abord, pour arriver sur ce qui semble être les zones "culminantes" :


Mais avant d'atteindre les rappels conclusifs, reste encore le rasoir, probablement le passage le plus célèbre de la course :


Ce passage est plus court que celui de l'Aiguille de la Vanoise, mais presqu'aussi impressionnant et en constitue une excellente introduction!

Nous arrivons dans une lumière de fin d'après-midi en bordure des rappels, se restaurant tranquillement le temps que la cordée précédente fasse passer tout le monde. Puis j'équipe la descente avec ma corde de 25m, sortant la réserve qui était comprimée dans le sac.

Et c'est parti pour un très beau rappel qui nous laissera un excellent souvenir :



Arrivé en bas sur la brèche (fin des difficultés) j'immortalise mon ombre sur le calcaire avec au lointain les Grandes Rousses :


A gauche, on distingue un rappel plus petit tandis que Sylvain termine le cycle des descentes par quelques galippades lyonnaises :


Un petit parfum de rosée de Provence sur les calcaires du Gerbier alors que nous entamons la descente dans un vent un peu frisquet :


La team s'enfonçant dans la sombre forêt où la nuit va nous engloutir...


Après un petit fourvoyage de rigueur dans la forêt la nuit, nous nous retrouvons au hameau des Clots laissant notre 69ard partir au lointain, vers quelques horizons rhodaniens, alors que Choupi', Nico et moi filons vers le sillon alpin.

Dernier tableau de la journée, celui de Grenoble lorsqu'on descend de Saint Nizier, cette métropole de lumière, tentaculaire, démesurée...

Merci à tous pour cette belle sortie automnale, et je crois que je languis déjà pour la prochaine excursion de notre quatuor de choc!!

dimanche 26 octobre 2008

Presles

Le week-end dernier, je suis allé avec Fred, un copain, faire quelques grandes voies à Presles. On va failli rebrousser chemin en tombant sur un bar à eaux. Mais nous avons pu nous remettre de nos émotions et nous diriger pour faire la voie Digitibus. Arrivés au parking des Grottes, on profite du paysage.


Très belle voie, avec un ou deux passages un peu techniques dans la deuxième moitié. Les rappels sont très gazeux, il y a de l'ambiance. Peut-être pour ça que Fred a été perturbé et a raté le début de son rappel, en plaçant son autobloquant au mauvais endroit! C'est filmé, si j'arrive a monter la vidéo, je vous en fait profiter. En fin de compte, on a commencé a descendre 150 mètres de vide.


L'arrivée tombe pile-poil dans un arbre d'une espèce peu connue (empaléus sodomus). Il vaut mieux savoir maitriser le slalom-rappel.


Pour vous donner une idée de l'ambiance, voici une photo envoyée par un pote dans "Le fou qui repeint son plafond", voie fameuse juste à côté de Digitibus (certains reconnaitront surement le pote en question).



Le soir, petit repas sympa à Pont-aux-Royans, à la Casa mia, qui nous sert sa spécialité la pizza aux ravioles: provisions en sucres lents garantie! Ensuite, on gare le camion sur le parking de Presles, afin d'être les premiers sur les voies. Raté: on se réveille vers neuf heures! Qu'à cela ne tienne, on se dirige vers la Voix d'Eliane.
Une grand classique, un peu embouteillée par ce beau dimanche. Erreur d'itinéraire pour la troisième longueur. On est partis à gauche dans une voie plus dure ("Les fouines"?) avant de s'en apercevoir et de redescendre. Du coup on s'est fait rattrapés par une autre cordée et après ça bouchonnait. L'occasion de faire connaissance lors des relais, notamment avec Uri, sympathique grimpeur israëlien.


C'est lui qui nous a envoyé quelques photos, notamment une photo de Fred, le roi des manips du dimanche (ce qui n'était pas forcément le cas le samedi!).


Après avoir bataillé chacun son tour dans un 6a athlétique, on fait encore une longueur en commun.


Nos chemins se séparent à la dernière vire. Pour notre part, nous faisons les deux dernières longueurs avant de se poser cinq minutes.


Retour au parking, un dernier coup d'oeil à la vallée de la Bourne, et on se rentre après deux jours magnifiques.